19 mai 2006
Au cours de la veillée du 19 mai 2006, Jean Odol nous a raconté, en l'émaillant de nombreuses anecdotes, l'histoire du Canal du Midi. Etonnant une veillée à Flourens sur le Canal du Midi, alors qu'on en est bien loin!
Cette veillée avait été précédée le 24 mars d'une visite des locaux des VNF, les Voies Navigables de France, au Port Saint-Sauveur à Toulouse. Nous avons pu admirer dans les archives du canal de nombreux documents d'époque. De là, déplacement au seuil de Naurouze le 22 avril sous la conduite de l'architecte Denis Pinel, passionné du canal et auteur de deux ouvrages sur ce sujet.
Pierre-Paul Riquet, né à Béziers en 1609, n'avait qu’une instruction rudimentaire ; mais il avait le sens du commerce et un génie inventif associé à un esprit d'entreprise peu commun. Cumulant les charges de Fermier des Gabelles en Languedoc et de Fournisseur des Armées du Roy, il avait amassé une importante fortune et acquis, entre-autres, le domaine de Bonrepos près de Verfeil et le château de Ramondens dans la Montagne Noire. Au cours de ses nombreux déplacements dans la région, il s'était préoccupé des difficultés de transport ; pour les résoudre, il avait imaginé un canal.
L'idée lui vint de réunir les eaux du versant méditerranéen et celles de la rivière Sor, versant atlantique. La solution : couper les torrents par une « rigole » à flanc de montagne, grouper leurs apports, les conduire en un point de la ligne de partage des eaux dit le Conquet et les déverser dans le Sor. Accompagné par le fils d'un fontainier de Revel, il allait parcourir le terrain, le niveler sommairement et s'assurer de la possibilité de réalisation de ce système. Nous étions en 1661. Il adresse alors un mémoire et une longue lettre à Colbert qui venait de recevoir toute la confiance de Louis XIV à la mort de Mazarin. Colbert adopte ce projet, dans le droit fil de sa politique d'expansion économique. Louis XIV se montre favorable et signe une lettre le 14 avril 1665: « Sa Majesté décide de faire réaliser le canal par ses soins ».
La « rigole » d'essai que Riquet avait fait réaliser durant l'été 1665 de Revel à Naurouze avait été un succès. Alors, en avant ! Entre 1667 et 1681, c'est près de 12 000 ouvriers qui vont creuser le canal, à la pelle et à la pioche ! Ouvert à la circulation le 15 mai 1682, le Canal du Midi est l'une des réalisations la plus extraordinaire de génie civil en France. Cette voie d'eau navigable mesure 241 km et relie la Garonne à la Méditerranée, de Toulouse à l'étang de Thau.
La construction du canal nécessita la réalisation d'un grand nombre d'ouvrages d'art, preuves du génie créatif de Riquet, permettant de passer outre aux difficultés du terrain: ponts-canaux, tunnels, la pente d'eau de Fonsérannes, écluses, ports…
Un exemple : pour assurer la remise en eau rapide des biefs vidangés pour des réparations, Riquet et les experts avaient prévu une quinzaine de réservoirs le long des rigoles de collecte. M. de Clerville proposa de remplacer ces « magasins d'eau », comme les appelait Riquet, par un seul grand réservoir. Près de la ferme de Saint-Ferréol, un resserrement du vallon sur un verrou rocheux fut retenu : la construction du réservoir allait constituer un exploit technique sans précédent. Cet ouvrage, admirablement conservé et en service depuis 1672 sans la moindre défaillance, étonne encore les constructeurs contemporains. Le volume de la réserve est à peu près égal à la contenance totale du canal. Vauban, successeur de M. de Clerville dans la charge de Commissaire général des Fortifications, visita tous les ouvrages ; il conclut à la nécessité de conduire dans le réservoir de Saint-Ferréol les eaux collectées par la « rigole » dans les périodes de pluies abondantes pour les y mettre en réserve. Vauban et Riquet dressèrent le projet de construction d'un tunnel de 123 m pour franchir l'arête de séparation des versants océanique et méditerranéen afin de régler les difficultés de remplissage du réservoir avec les seuls apports du bassin versant de l'Audot.
Le site a été classé au patrimoine mondial de l'humanité par l'UNESCO en 1996.